"Quand la série a commencé à être diffusée, le dessinateur Matt Groening voulait que les gens remarquent que c'était un dessin animé pas comme les autres. Quand on zappe les différentes chaînes, on remarque tout d'un coup les personnages jaunes, et on s'arrête pour regarder. Par ailleurs, c'est aussi pour des raisons économiques, car la couleur jaune ne coûte pas cher", précise Véronique Augereau.
Créés en 1989, les Simpson vivent aujourd'hui leur 34ème saison. Famille américaine qui ne vieillit pas, ils incarnent la famille américaine typique issue de la middle class. Vivant dans la banlieue résidentielle de Springfield, les fameuses suburbs, les personnages jaunes imaginés par Matt Groening nous renseignent sur les évolutions de la classe moyenne : de l’idéal de la consommation, image d’Epinal de l’Amercian Way of Life, au déclassement de cette middle class en passant par les affres de la mondialisation, les Simpsons traversent le XXème siècle et les soubresauts d’une économie changeante sans jamais décolorer.
"Les Simpson ont le petit pavillon, le box pour ranger la voiture, la télé omniprésente dans le salon. Et puis, ils habitent à Springfield, or il y a énormément de Springfield aux Etats-Unis, c'est presque une ville universelle là-bas" remarque Philippe Peythieu.
Si Homer et Marge Simpson incarnent une forme de stabilité, par la permanence des personnages et le cliché qu’ils mettent en scène, la famille Simpson se débat malgré tout, au fil des épisodes, avec des problèmes économiques (dette, financement des études, chômage) et les personnages qui les environnent dressent ensemble un portrait de la société américaine, à bien des égards inégalitaire.
"Les années 1980 sont un moment de scandales, notamment environnementaux. Le fait qu'Homer travaille dans une centrale nucléaire nous dit quelque chose. On sent une menace potentielle qui plane au-dessus de Springfield, de manière assez palpable", analyse Tamara Boussac.
Immédiatement identifiables par leur dessin et leurs voix si caractéristiques, les Simpson se sont imposés dans le paysage audiovisuel depuis plusieurs décennies. Devenu aujourd’hui véritable produit de consommation, l’évolution de ce programme nous renseigne aussi sur les évolutions de la pop culture.
Selon Romain Nigita, "certes, la série s'en prend à tous les capitaines d'industrie. Mais il y a aussi un équilibre propre à la télévision américaine, y compris dans les séries qui parlent du monde politique directement. Les scénaristes vous diront qu'ils sont obligés de taper sur tous les camps pour garder tous les téléspectateurs. Malgré tout, les Simpson sont sur une chaîne commerciale financée par la publicité. Donc on peut pas se mettre à dos l'intégralité du public".
Pour aller plus loin
- Romain Nigita, avec Alain Carrazé : Series' anatomy: le 8e art décrypté (Editions Fantask, 2017)
- Tamara Boussac : L’affaire de Newburgh, aux origines du nouveau conservatisme américain (Presses de Sciences Po, 2023)
Références sonores
- "Le jaune, couleur du doute, avec Michel Pastoureau", Concordance des Temps - France Culture, 12 octobre 2019
- "Rare Interview with "The Simpsons" Creator Matt Groening from 1990", Forgotten Media - Youtube, 22 janvier 1990
- Extrait de la série, Saison 33 Episode 21, "Rock à la maison des pauvres partie 1"
- Extrait de la série, Saison 33 Episode 21, "Rock à la maison des pauvres partie 2"
- Extrait de la série, Saison 17 Episode 17, "Notre Homer qui êtes un Dieu"
- Extrait de la série, Saison 20 Episode 7, "Les Apprentis Sorciers"
- Extrait de la série, Saison 6 épisode 21, "Il faut Bart le fer tant qu'il est chaud"
Références musicales