Découvrir comment un artiste travaille pour essayer d’approcher les conditions d’exercice de son art, c’est l’objectif de cette Masterclasse. Au micro d’Arnaud Laporte, producteur de La Dispute **sur France Culture, Zabou Breitman revient sur son parcours de comédienne et de metteuse en scène au théâtre comme au cinéma. **
Zabou Breitman mène depuis les années 1980 une riche carrière. Enfant, elle aimait fabriquer, de ses mains, des petits objets. Elle a gardé ce goût de faire, toujours en mouvement et menant sa carrière de projet en projet, jamais les mêmes et naviguant entre le jeu, la réalisation, la mise en scène. L'amour du métier, dans lequel elle a baigné depuis enfant, n'a pas été de l'ordre de la vocation, c'est une voie qui s'est construite avec le temps, au fil de rencontres, d'échanges...
Petit à petit, je suis tombée amoureuse de mon métier. Il y a des amours comme ça. Il y a des passions et parfois l'amour grandi avec le temps.
Zabou Breitman, une enfant de la balle plongée très tôt dans le bain du cinéma
Son père Jean-Claude Deret, était scénariste, dramaturge, écrivain et comédien, et sa mère, Céline Léger, comédienne. Son prénom, Isabelle, était celui du personnage qu’incarnait sa mère dans le feuilleton Thierry la Fronde. C’est d’ailleurs à la télé dans les programmes jeunesse d’Antenne 2, aux côtés de Dorothée que Zabou Breitman a débuté sa carrière. Viendront ensuite de nombreux films et nombreuses pièces au cours des années 80, et en 1992 La Crise de Coline Serreau et Cuisine et Dépendances de Philippe Muyl notamment.
Zabou Breitman : "L’ennui est un endroit où on se fabrique. Le fait d’avoir appris tellement lorsque j'étais très jeune et me retrouver à un endroit où je me suis ennuyée, la fac, a fait que j’ai lu énormément, j’ai tout lu, et tout ça a dû se déposer et fabriquer une drôle de façon d’être : hyper active et contemplative. J’adore ne rien faire. (...) Je travaille d’une façon beaucoup plus assidue comme réalisatrice ou metteur en scène que comme comédienne. Est-ce parce qu’au fond, je ne suis pas si comédienne que ça ? (...) La déconcentration est une clé extraordinaire pour un acteur. On a besoin de fausse déconcentration très travaillée et d'une forme de lâchage de nous de laisser faire de laisser attendre. (... ) C'est peut être dans les comédies très légères, que j'adore d'ailleurs, que le travail est le plus difficile. Quand on n’a pas un très grand texte, il faut bien se dépatouiller avec, il faut y aller même si l’eau est froide."
Une metteuse en scène récompensée
En 2001, la comédienne se lance dans la réalisation avec Se souvenir des belles choses, elle récoltera trois Césars dont celui de la meilleure première œuvre de fiction. En 2003, une mise en scène de théâtre, cette fois, avec la pièce de Roland Topor L'Hiver sous la table, et six Molières à la clé, dont ceux du meilleur spectacle de théâtre privé et du meilleur metteur en scène.
En 2009, la pièce Des gens adaptée de Raymond Depardon, obtient deux Molières. En 2014 s’est à la mise en scène d’opéra que Zabou Breitman s’essaye avec L’enlèvement au sérail, de Mozart, à l’Opéra de Paris. Plus récemment c’est à l’univers des séries que la touche à tout se frotte en réalisant pour Canal Plus, la série Paris etc co-écrite avec la romancière et scénariste Anne Berest sur une idée originale de Maïwenn (Polisse, Mon roi…).
Zabou Breitman : "Je trouve beaucoup plus difficile de mettre en scène au théâtre qu'au cinéma. Au cinéma c’est un plan fixe, il faut être astucieux ou extrêmement talentueux et avoir beaucoup d'idées mais l'art vivant est extrêmement différent, je m’en suis longtemps sentie totalement incapable. (...) Il faut laisser une place pour une curiosité, pour une chose à laquelle on n'a pas pensé. Si on fige tout on perdra un peu de vie. (...) J’ai toujours aimé transmettre. La transmission est fondamentale. Aujourd'hui j’ai envie de produire des jeunes metteurs en scène."
Réécoute du 21 août 2017