Syracuse

Dans ce premier épisode, Alain G., Bugz Béni et Baz Le Sel partent à la rencontre d’artistes pour comprendre le rapport qu’ils entretiennent au rap et comment ils le définissent. Pour certains, comme le rappeur Vîrus, le rap est beaucoup plus qu’un genre musical : c’est une nécessité, le but d’une vie, en tout cas, c’est une affaire sérieuse.

Rapper à l'ère des algorithmes

Comment concilier les dimensions artistique et commerciale du rap ? Pour la rappeuse et entrepreneuse Vicky R, les algorithmes et trend TikTok constituent un système politique qui pousse les artistes à "travestir [ce qu'ils sont] pour rentrer dans des cases, pour pouvoir être vu[s]". Pourtant, sans même parler de l'influence des réseaux sociaux sur l'industrie musicale, pour le rappeur et beatmaker STI, rapper exige une sincérité envers soi-même et les autres : "Comme je cherchais à plaire, je n'étais pas sur le bon chemin et ça se ressentait. C'est vraiment une histoire de confiance. Une fois que tu sais qui tu es, où tu veux aller, ça se ressent dans ta musique. C'est ces choses-là qui font que les gens écoutent."

Le rap comme médicament social

Les morceaux de rap sont certes des textes musicalisés, mais ils s'inscrivent aussi dans une culture à part entière, pouvant même revêtir un caractère sacré. Pour le rappeur Vebz, rapper, c'est "transcender l'être humain, [...] faire quelque chose de plus grand" que soi. Au-delà du rhythm and poetry, le rap est un témoin littéraire. Il représente pour Nikkfurie "l'expression artistique absolue, [...] la plus accessible, parce que tout le monde peut faire du rap. [...] C'est une musique sociologique." Il peut ainsi constituer un héritier de la poésie traditionnelle, qui ouvre la voie aux "plumes populaires", habituellement peu représentées dans le paysage littéraire français.

Vivre hip-hop

Le rap incarne aussi une philosophie de vie, un espace d'échanges et de développement d'une communauté qui renforce l'estime de soi. Il devient un élément central dans la construction de l'identité de ceux qui le pratiquent, allant même jusqu'à constituer une approche thérapeutique, d'après Grems, rappeur et artiste plasticien : "C'est mon psychologue, c'est mon école, c'est mon prof d'anglais. Et donc, moi, dans mon époque, mon illettrisme, ma manière d'être, ma dyslexie, [...] je me suis lancé dans cette espèce de truc de faire du rap pour me sortir un peu de tout ça et pour me donner une énorme confiance en moi. C'est ça être hip-hop, [...] c'est se démerder, se débrouiller."