Le séisme du 6 février dernier est le plus fort recensé sur la partie méridionale de la faille est-anatolienne, indique le rapport de l' Institut américain d’études géologiques. C’est cette même partie qui avait déjà causé un fort tremblement de terre en 1822. Sur cette faille, le choc du 6 février a provoqué une rupture de 200 kilomètres de long, 25 kilomètres de profondeur, et un déplacement de la plaque anatolienne d’au moins trois mètres.
Après les réplique du 20 février, le bilan dépasse désormais les 50 000 morts. Les résidus d’amiante, de plomb ou de micro-plastiques polluent les gravats et les airs. Des craintes d’une épidémie de choléra émergent également. Vingt-quatre ans après le séisme d’Izmit près d’Istanbul, le pays ne semble pas beaucoup mieux préparé. Les normes antisismiques adoptées à l’époque n’ont pas été respectées. Une colère se fait entendre à la fois contre des promoteurs immobiliers tricheurs, mais aussi contre le président Recep Tayyip Erdogan et son parti l’AKP qui depuis 20 ans maintenant, fonde la croissance économique du pays sur le secteur du bâtiment.
Julie Gacon reçoit Gülçin Erdi, chargée de recherche CNRS en mobilité à l'Institut Français d'Études Anatoliennes (IFEA) ainsi que Yoann Morvan, anthropologue, chargé de recherche au CNRS
"Au-delà des bâtiments individuels et commerciaux, un certain nombre d’infrastructures publiques -l’une des fiertés du régime- ont aussi été détruites. Cela pose la responsabilité de l'État car certains bâtiments étaient censés servir de refuge aux populations comme des hôpitaux ou permettre l’arrivée des secours comme l’aéroport d’Antioche" explique Yoann Morvan.
Selon Gülçin Erdi : "ce séisme est le miroir des dysfonctionnements du régime présidentiel et suscite de nombreuses interrogations sur les conditions de réalisation des élections [présidentielles de mai 2023] notamment dans les régions touchées par la catastrophe."
Pour aller plus loin :
Seconde partie : le focus du jour
Réfugiés syriens : la crainte du retour forcé
Avec Nouran Gad, doctorante en sciences politiques à Sciences Po Aix.
Depuis 2011, des millions de Syriens ont fui les exactions commises par le régime de Bachar Al-Assad. Beaucoup ont trouvé refuge dans le sud de la Turquie, malgré la xénophobie des Turcs alimentée par les responsables politiques. Le six février, le malheur et la mort les y ont rattrapé.
Comment sont prises en charges les victimes syriennes par l’Etat turc ? Leurs proches peuvent-ils accompagner leurs corps en Syrie, sans risquer de se voir refuser le retour ? En effet, Ankara affiche depuis un an l’intention de voir ces Syriens rentrer chez eux, « sur la base du volontariat » promet Recep Tayip Erdogan.
"Dans une société déjà en situation de crise économique avec une xénophobie antisyrienne latente, des rumeurs de pillages commises par des Syriens se sont rapidement diffusées et les cas de discriminations ont explosé" observe Nouran Gad.
Références sonores & musicales
Une émission préparée par Bertille Bourdon.