Syracuse

Quand ça concerne sa personne, et non plus un groupe qu’il défend, Daniel Defert mute en grand discret. Les informations sur son enfance sont succincte : il naît en 1937, quelque part en Bourgogne, et devient l’aîné d’une fratrie de quatre garçons. Un père de 40 ans, coiffeur (avec le prix nobel de littérature Romain Rolland parmis ses clients), “peut-être pas assez présent”, et avec une santé fragile. Il se souvient : “les questions médicales sont entrées très vite dans mon horizon personnel”.

Un souvenir de son enfance rejaillit pourtant à la surface : la Libération. “J’avais une curiosité pour ces événements militaires. […] Une nuit, nous avions tellement l’habitude du bruit, que nous n’avons pas entendu le départ des Allemands. […] Le lendemain matin, dans un calme absolu, on voit arriver les [autobus des] maquisards. Et c’est immédiatement la fête, toutes les pancartes sont arrachées, on pénètre l'hôtel qui était la kommandantur…”

Une mère "remarquable"

Aux côtés d’un père absent, Daniel Defert dépeint une mère rayonnante. “Une femme remarquable, qui a marqué tous les gens qui l’ont approché. Mes camarades de l’école venaient à la maison essentiellement pour ma mère, rit-il. Mais elle avait dans sa vie une souffrance", ajoute-t-il en évoquant le “stigmate” à l'époque de ses origines juives.

Enfant, puis adolescent, alors qu’il commence à se déguiser en fille, celle-ci ne lui appose pas de jugement. Et un évènement en particulier lui revient en tête. "Je devais avoir 13 ans, on est passé devant le grand café de la ville, la terrasse était pleine, y avait des tas d’hommes, de garçons de tout âge, et je les regardais avec certainement une insistance dont je n’avais APS conscience moi-même, et quelqu'un, je crois, a crié ‘pédé'. Ma mère m’a serré contre elle très fortement, et j’ai eu une vive émotion… Je pense que ca m’a donné une confiance en moi et en elle définitive."

Générique

Par Virginie Bloch-Lainé. Réalisation : Laetitia Coia. Prise de son : Yves le Hors.