Syracuse

Si Martha Gellhorn fait partie des plus grands écrivains, c'est notamment parce que ses œuvres nous donnent la sensation, selon les mots d'Alexis Jenni, d'être de la langue, d'être tout entier plongé dans la langue. Cette qualité particulière de son écriture n'est pas sans rapport avec la vie qu'a choisie de mener cette exploratrice, qui, dès l'âge de vingt-et-un an, avait décidé de voyager partout, tout voir et l'écrire à sa manière. Elle ne renoncera pas pour autant à garder une relation intime avec ses parents, qu'elle admirait, et notamment avec sa mère à qui elle écrivait tous les jours. Aux classiques de la littérature, elle préfère les romans noirs, et se consacre au journalisme, qu'elle fera toujours côtoyer à la fiction. Ce sont ses reportages de guerre qui la rendront célèbres, ceux en Espagne d’abord, puis sur les fronts de la Seconde Guerre mondiale, et un peu partout en Europe et en Asie. Elle va publier quarante-quatre reportages dans Colliers qui vont la faire connaître du grand public et qui vont contribuer à sa légende de "la-grande-reporter-de-guerre-de-son-époque". Saisie par la beauté de la nature, elle a conscience que c'est une des bénédictions constantes de ma vie d’avoir pu découvrir à temps les merveilles du monde. Ses œuvres sont en effet les témoignages d'un monde qui passe. Son premier travail comme apprentie reporter au Times Union d’Albany est un déclic, car bien qu'elle soit la seule femme de la rédaction, elle s'y épanouie à merveille. Son deuxième roman, J'ai vu la misère, s'inspirera d'un reportage dans l'Amérique en crise. Ce sera le début de sa carrière, qui sera notamment propulsée par la rencontre avec Hemingway, dont elle fut l'épouse pendant neuf ans, et qui l'encouragea à l'accompagner en Espagne pour effectuer son premier reportage de guerre.

• Les invités : Marc Kravetz, journaliste, ancien chroniqueur à France Culture pour "Les Matins de France Culture", journaliste reporter récompensé par le prix Albert-Londres en 1980, spécialiste de Martha Gellhorn dont il a écrit la préface des romans et recueils d'articles tels que Mes saisons en enfer, voyages cauchemardesques en 2015, J'ai vu la misère, récits d'une Amérique en crise en 2017 et Le Monde sur le vif en 2019, tous parus aux éditions du Sonneur.
• Alexis Jenni, écrivain, auteur de L’Art français de la guerre, pour lequel il reçoit le prix Goncourt 2011, Féroces infirmes en 2019, et de La beauté dure toujours publié en 2021 aux éditions Gallimard, et auteur d'un article intitulé Martha Gellhorn, l’exploratrice du XXè siècle paru dans la Nouvelle Revue française.