Quand on parle aujourd’hui de la jeunesse, on pense plus souvent aux jeunes des quartiers qu'à ceux des campagnes. Or, ils sont plus de 10 millions de moins de 20 ans à vivre en zones rurales et dans de petites villes. Parmi eux, une poignée grandit dans des fermes et souhaite reprendre l’exploitation familiale. L’un d’eux explique : “ça me plaît, c'est une passion, on a ça dans le sang, j’aime ça. C'est ma vie, je suis né dedans, je ne pourrais pas faire autre chose."
Nous les rencontrons au Lycée agricole de La Brosse, près d’Auxerre. Le travail dans les champs et auprès des bêtes, c’est toute leur vie. On croit qu’ils se sentent obligés, on questionne le déterminisme, tandis qu’ils s’estiment les plus heureux du monde et plaignent les citadins mal informés : “Je ne veux pas faire de généralités, mais souvent les gens qui sont désinformés, ce sont des gens qui viennent de la ville. Mais ce n’est pas forcément leur faute, puisqu'ils ne sont pas au contact des agriculteurs.” Un autre ajoute : “Il y a une barrière entre la ville et la campagne. Parce que souvent, les gens de la ville restent à la ville et ils y restent enfermés. Mais comme nous, on peut rester enfermé à la campagne et du coup, il y a un gros manque d'information."
Le politologue Jean-Vincent Holeindre, voit se développer un fossé de plus en plus grand entre les différentes strates de la population, surtout avec la montée en puissance de la revendication écologique : “Aujourd'hui, il y a clairement un choc des cultures et même une opposition des jeunesses. Là aussi, on sait que la France est un pays fragmenté, un pays clivé, avec une difficile coexistence, cohabitation des différentes cultures ou des différentes communautés ”.
On imagine des campagnes isolées, sinistrées par les grandes exploitations conventionnelles. Ils répondent poésie des chemins et des champs à perte de vue, amour des vaches, et des tracteurs : “Je préfère presque être avec une vache qu'être avec des humains. C'est un regard entre moi et l'animal, j’aime ce regard-là. J'aime être avec les vaches. Entre moi et les vaches, il se passe quelque chose. J'aime être avec elle, c’est un sentiment d’amour presque”.
À quoi ressemble un adolescent élevé à la campagne, quand il porte une cote et des bottes ? Qui sont ces jeunes ancrés dans le concret, sachant déjà, à 16 ans, pour qui ils voteront aux prochaines élections, alors qu’ils considèrent être les oubliés des politiques : “Je trouve qu'on est quand même un peu oubliés. On centralise tout autour de la ville et puis on nous oublie, on n'en parle pas souvent de campagne”.
Et comment envisagent-ils l’avenir de l’agriculture, ceux dont le travail, destiné à nous nourrir, transforme profondément les territoires de nos campagnes ?
Un documentaire de Pauline Maucort, réalisée par Gaël Gillon.
Avec :
- Louis, Emilien, Dorian, Antoine, Grégoire, Timéo, Gabin, élèves au Lycée agricole de La Brosse
- Benoît Coquard , sociologue, « Ceux qui restent »
- Jean-Vincent Holeindre , politologue
Bibliographie :