Mauvaise graine, la petite délinquance sous surveillance. En 1803, Louis-François-Marie Bellin de La Liborlière fait paraître « Voyage de M. Candide fils, au pays d'Eldorado vers la fin du dix-huitième siècle », un ouvrage qui se veut une suite à Candide, de Voltaire : « Monsieur, demanda Pangloss, comment faut-il traiter messieurs vos enfants, sous le rapport des mœurs et de la conduite ? Ma foi, dit M. Fricot, je crois qu’à cet égard vous pouvez leur laisser faire ce qu’ils voudront ; il faut bien que jeunesse ». L’expression se retrouve chez Balzac, chez Richepin, et chez plein d’autres auteurs au XIXe siècle. Après la Seconde Guerre mondiale, les autorités reprennent cette devise à leur compte, avec une précision : il faut bien que jeunesse… sous surveillance. Xavier Mauduit
Mauvaise graine, apaches, voyous, blousons noirs, racailles : les mots changent mais la délinquance juvénile demeure. Issus des classes laborieuses, ces petits bandits vivent de quelques larcins, de friponneries, de fourberies… Une question revient sans cesse : quelle réponse apporter à la petite délinquance ?
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, une nouvelle philosophie judiciaire apparaît. Désormais, il faut tenter de comprendre, d’éduquer et non plus de réprimer : « Mieux vaut prévenir que punir ». Les centres d’observation voient alors le jour. Durant trois mois, le jeune délinquant y est placé et les professionnels essaient d’expliquer l’acte déviant. Nous vous proposons de plonger dans les archives de ces institutions et de découvrir qui étaient ces jeunes délinquants ? Comment vivaient-ils l’enfermement, l’éloignement, le regard inquisiteur des éducateurs ? L’observation était-elle neutre ou empreinte de stéréotypes ? Nous en parlons avec…
Véronique Blanchard, docteure en histoire, responsable du centre d’exposition « Enfants en justice » à Savigny-sur-Orge (École nationale de protection judiciaire de la jeunesse), co-rédactrice en chef de la Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière » (RHEI). Elle est notamment co-auteure avec David Niget de Mauvaises filles. Incorrigibles et rebelles (Textuel, 2016), avec Frédéric Chauvaud de Vagabondes, voleuses, vicieuses. Adolescentes sous contrôle, de la libération à la libération sexuelle (François Bourin, 2019). Avec Mathias Gardet elle coécrit Mauvaise graine. Deux siècles d'histoire de la justice des enfants (Textuel, 2019) et La parole est aux accusés (Textuel, 2020).
Le juge pour enfants est central dans l'organisation de la justice des enfants à partir de 1945. En France, il y a non seulement l'ordonnance de 1945 mais aussi la mise en place d'un juge spécifique pour les enfants (...) Un juge pour enfants qui va être là pour comprendre, connaître, et ensuite appliquer les mesures éducatives qui soient le plus appropriées à l'individualité du jeune qui va être dans son cabinet. Tout ne se passe pas au tribunal pour enfants mais beaucoup dans l'intimité du cabinet du juge. Celui-ci a aussi une casquette très paternaliste puisqu'il est là d'une manière très imposante, dans une relation individuelle avec le jeune et un peu avec sa famille. Les années 50-60 marquent les prémices du travail avec la famille. Véronique Blanchard
Sons diffusés :
- Archive - 01/01/1965 - ORTF - Juge des enfants, L’avenir est à vous - Bilan 20 ans après la mise en place du juge des enfants.
- Archive - 15/12/1963 - Les grandes conférences - Maurice Garçon parle de "la correction paternelle" (1804 - 1958) une loi qui permet aux pères d'envoyer leurs enfants en prison.
- Archive - 17/05/1961 - En direct avec vous - La délinquance filles à Lyon.
- Archive - 1963 - Paris Inter - Dix questions à … - Les blousons noirs vus par Jacques Brel.
- Archive - 27/09/1966 - RTF - Zoom - Avoir 18 ans à Fresnes.
- Archive - 01/20/1975 - Mercredi Jeunesse, Montreuil sur Hollywood - Reportage de Paula Jacques sur les blousons noirs.
- Extrait du film Les 400 coups (1959) réalisé par François Truffaut.
- Lecture par Sandy Boizard de la « Conclusion du rapport d’observation du centre de Savigny-sur-Orge, 23 février 1960 », extrait de La parole est aux accusés (Textuel, 2020).