"Le Misanthrope" de Molière, par Georges Lavaudant
En plus de 50 ans de carrière, c’est la première fois que Georges Lavaudant choisit Molière, en tout cas en français, parce qu’il avait dirigé un Misanthrope en catalan, il y a 15 ans.
Et là, il a eu la bonne intuition de solliciter Eric Elmosnino pour camper Alceste, désespéré par les faux-semblants, en quête de vérité absolue et pourtant amoureux d'une brillante experte en mondanité, j’ai nommé Célimène.
Tous les comédiens sont habillés en noir et blanc, smoking pour les hommes, robes de soirées pour les femmes.
Un mur de miroirs tâchés structure le plateau. Les comédiens s’y reflètent et le public aussi. Selon les scènes, ce mur pivote et au verso, on est dans le dressing de Célimène avec des tenues magnifiques alignées sur des cintres.
Ces costumes, comme la scénographie, sont signés Jean-Pierre Vergier, collaborateur de longue date de Lavaudant.
Mélodie Richard joue Célimène, François Marthouret est Philinte, Aurélien Recoing interprète Oronte, pour ne citer que quelques membres de la troupe, Eric Elmosnino en tête, donc, qui, je crois, dit des alexandrins pour la première fois.
"L’art de ne pas dire" de Clément Viktorovitch, par Ferdinand Barbet
Voici le cynisme de la communication politique, avec un homme qui connaît très bien le dossier puisqu’il fut assistant parlementaire, enseignant à Sciences Po pour des cours de rhétorique et de négociation ; il fut aussi chroniqueur sur France Info, Canal + et il joue son premier seul en scène.
Sur un plateau quasi-nu, avec seulement trois grandes bandes blanches verticales comme des colonnes, Clément Viktorovitch incarne le conseiller en communication d’un député qu’il a contribué à faire élire président de la République.
Comme le nouvel élu l’a viré pour malversation financière, il décide de se venger avec la conférence à laquelle nous allons assister.
La mise en scène est de Ferdinand Barbet, qui a aussi coécrit le texte.
Et pendant 1 h 15, Clément Viktorovitch révèle et décortique tous les secrets du langage politique, en faisant participer le public avec succès.
Les dates de sa tournée
Golem" de et mis en scène par Amos Gitaï
Le golem, c’est cette créature de la culture juive, je cite Gitaï, “inventée par l’être humain, pour lutter contre les attaques envers les juif”.
Dans la culture pop par exemple, les superhéros sont une déclinaison de cette figure du golem : des créatures qui protègent les hommes, à condition de les désactiver quand il faut.
Le Golem est le fil rouge de ce spectacle, composé de 12 tableaux. C’est un montage de textes religieux, littéraires, notamment du prix Nobel Isaac Bashevis Singer. Il y a aussi des extraits de films de Gitaï lui-même et des chants - c’est un spectacle très musical - avec trois musiciens : pianiste, violoniste, percussionniste, qui est sur scène pendant toute la pièce.
Ce montage crée des ruptures de ton, il y a le récit de l’horreur des pogroms, il y a la douceur du conte, porté par Irène Jacob, de l’humour, du burlesque avec Micha Lescot.
La distribution est internationale et on entend le texte en yiddish, allemand, arabe, espagnol, hébreu, ladino, russe.
"Les Liaisons Dangereuses" de Choderlos de Laclos, par Arnaud Denis
La mise en scène et l’adaptation sont signées Arnaud Denis, qui a eu l’audace de couper le texte, parfois de le réécrire, d’y ajouter des éléments en piochant dans Le marquis de Sade, Molière ou Racine.
Il y a les amours infernales du vicomte de Valmont et de la Marquise de Merteuil. Son désir de vengeance à elle, sa soif de séduction destructrice à lui, avec le jeune Cécile de Volanges et avec Madame de Tourvelles.
Le décor est fait de bougies, de toiles peintes. Les comédiens jouent en costume fin XVIII°, perruqués et poudrés pour certains et j’aimerais citer la plupart, parce qu’ils sont épatants : Delphine Depardieu, en Merteuil, Valentin de Carbonnières en Valmont, Michèle André qui joue la douairière Madame Rosemonde, Marjorie Dubus pour Cécile de Volanges et Salomé Villiers en Madame de Tourvel.
"Niquer la fatalité" d’Estelle Meyer, par Margaux Eskenazi
L'alliée qu’Estelle Meyer s’est choisie pour “niquer la fatalité”, c’est Gisèle Halimi, dont elle convoque le fantôme sur scène. Elle joue des moments de sa biographie, interprète des extraits de ses plaidoiries historiques, invente un dialogue avec elle, et à cette présence de Gisèle Halimi, Estelle Meyer mêle un récit intime, de sa naissance à ses 37 ans d’aujourd’hui. Elle livre ses premiers émois, les transformations de son corps, la première relation sexuelle, les virées la nuit entre copines, l’extase, l’horreur du viol, la réconciliation rêvée.
Il y a du jeu, des chansons, et aussi des adresses au public qui deviennent rituels collectifs.
Ce spectacle a aussi fait l’objet d’un podcast sur France Culture. Il porte le même titre – Niquer la fatalité - il compte six épisodes qu’on peut écouter gratuitement via l’appli Radio France.
Dates de tournée
- du 27 au 29 mars 2025 | maison de la culture, scène nationale de Créteil
- les 15 et 16 mai 2025 | théâtre de Cornouaille, Quimper
- les 20 et 21 mai 2025 | théâtre national de Nice
- les 23 et 24 mai 2025 | le liberté, scène nationale de Toulon
- les 27 et 28 mai 2025 | la joliette, Marseille
"Le Prix" de Cyril Gely, mis en scène par Tristan Petitgirard
Une pièce que Cyril Gely a adaptée de son roman et qui est inspiré d’une histoire vraie : celle de l’Allemand Otto Hahn, lauréat du Nobel de chimie en 1944.
Quelques heures avant la remise du prix, Lise Meitner, le rejoint à son hôtel, non pas pour le féliciter, mais lui rappeler ce qu’il lui doit. “Je ne veux pas disparaître sans m’expliquer avec toi”, c’est ce qu’elle lui dit.
Lise Meitner fut une scientifique autrichienne, juive, qui a très largement contribué aux découvertes d’Otto Hahn sur la fission nucléaire, et qui s’est réfugiée à Stockholm pour échapper au nazisme.
Le titre de la pièce, “Le Prix”, renvoie donc autant à celui qu’on l’on reçoit, qu’à celui qu’on doit payer, et c’est la première fois que Ludmila Mikael et Pierre Arditi forment un duo sur scène.
Coups de cœur
Pierre Lesquelen : le festival WET (organisé par le Centre dramatique national de Tours) à Tours, du 28 au 30 mars.
Sandrine Blanchard : le spectacle "Le poids des fourmis", de la compagnie québécoise Théâtre Bluff (en tournée : L’Estive, Scène nationale de Foix les 27 et 28 mars / Opéra Grand Avignon les 2 et 3 avril / Théâtre de Langres le 24 avril / Le Grand Bleu, Lille, dans le cadre du Festival Youth is Great le 29 avril).
Laurent Goumarre : Les reprises de deux pièces : “Coup fatal” et “Out of Context.For Pina” du chorégraphe Alain Platel (en tournée : pour “Coup fatal” (le 25 mars à Théâtre Romain Rolland, Villejuif / du 28 mars au 05 avril au théâtre du Rond-Point + “Out of contexy.For Pina” : du 07 au 09 avril au Cent4 de Paris).
Fabienne Pascaud : La comédienne Dominique Reymond dans le spectacle “L'Amante anglaise” de Duras, mis en scène par Emilie Charriot à l'Odéon du 21 mars au 13 avril.
Rebecca Manzoni : à l’invitation de l’historien Patrick Boucheron, Wajdi Mouawad est invité à donner une série de leçons au Collège de France. On peut se rendre sur place, le mardi entre 9 h et 10 h 30, au Collège de France et pour qui n’est pas parisien, sa leçon inaugurale est visible sur le site du Collège de France ou sur youtube jusqu’au 8 avril.