Après l'horreur d'Hiroshima et de Nagasaki, aurions-nous pu vivre dans un monde sans armes nucléaires ? Ce fut l'objectif du plan Baruch discuté à l'ONU dès 1946. À cette heure, seuls les États-Unis possèdent la bombe atomique. Tout est alors possible – ou du moins le croit-on... Hélas, la défiance entre les deux grandes puissances est telle que les négociations entre Américains et Russes ne peuvent aboutir. Et, trois ans plus tard, en 1949, la première bombe atomique soviétique explose.
La course aux armements
Si elle est encore pensée comme une arme "conventionnelle", d'utilisation – et non de dissuasion comme ce sera le cas quelques années plus tard — c'est à une véritable course aux armements que les deux grands rivaux se livrent au début des années 50. D'autres pays, à la suite de l'URSS, veulent la posséder et investissent dans un programme nucléaire militaire. Il faut posséder l'arme atomique pour être un grand de ce monde (les cinq pays permanents du conseil de sécurité des Nations Unis la possèderont : Chine, USA, URSS, France et Grande-Bretagne).
En 1952, la surenchère se poursuit. Ce n'est plus le nombre d'armes qui augmente, mais la puissance de la bombe. Les Américains mettent au point la bombe H, bientôt suivis par les Soviétiques. C'est l'escalade, sans fin.
Journal de la bombe : "5 décembre 1953. Depuis la venue au monde d'une enfant dégénérée kazakhe, je ne sais plus où donner de la tête. Les Soviétiques l'ont dopée. Elle pèse 400 kilotonnes... J'ai 8 ans et je suis sans cesse dépassée. Je me démultiplie, je ne sais plus où j'en suis."
Une époque "horriblement stable"
Quel rôle la bombe atomique a-t-elle joué au cours de la Guerre froide ? Une « époque aussi horriblement stable que les empires esclavagistes de l'Antiquité », comme la décrit Georges Orwell en 1946. Car si nous sommes passés de très près à plusieurs reprises d'une guerre nucléaire (crise de Cuba, de Berlin...), les victimes sont toutefois bien réelles, avec plus de 2 400 essais nucléaires, dont 543 essais atmosphériques, réalisés principalement dans l'hémisphère nord.
Après l'effondrement de l'URSS, d'aucuns se demandent à quoi bon toutes ces armes, alors que les arsenaux sont passés de 3 000 têtes nucléaires en 1955 à plus 70 000 à la fin des années 80. Et l'on voit Reagan et Gorbatchev signer un traité, le FNI (Forces nucléaires à portée intermédiaire, 1987), qui pourrait conduire les deux superpuissances vers le désarmement.
Avec David Holloway (historien, université de Stanford, USA), Yves Lenoir (ingénieur), Frédéric Gloriant (historien, Centre interdisciplinaire sur les enjeux stratégiques), Benoît Pélopidas (historien, Sciences Po), Emmanuelle Maître (chargée de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique), François Heisbourg (conseiller pour l'Europe de l'International institute for strategic studies), Harry Bernas (physicien, CNRS), et Bruno Villalba (sociologue, AgroParisTech).
