Le "confucianisme" est une notion complexe, parfois obscure, en raison de l’utilisation et de l’instrumentalisation de la pensée de Confucius, qui a vécu à la charnière des 6e et 5e siècles avant Jésus-Christ. Le terme "néo-confucianisme", qui émerge au 11e siècle sous la dynastie des Song et perdure jusqu’au début du 20e siècle, reconstruit souvent la vision du monde de Confucius plutôt que de la décliner. Par ailleurs, le taoïsme, un autre courant philosophique chinois, suscite la question de savoir s’il constitue un envers de la philosophie confucéenne ou si cette opposition simplifie excessivement les deux courants.
L’harmonie selon Confucius : un tripode entre humanité, étude et rite
Confucius, comme le souligne Olivier Boutonnet, “ne dit rien de nouveau” mais “réchauffe le passé pour comprendre le présent”, “cela passe par une harmonisation du corps social qui se fonde sur une harmonisation de sa propre personne”. Il ajoute “on pourrait dire que cela se fonde sur un tripode”. D’abord, “la vertu d’humanité, c’est-à-dire comment vivre en homme digne parmi les hommes”, qui “doit s’apprendre”. Ensuite, l’étude, indispensable à cette formation. Enfin, “le rite, qui permet à chacun de mettre en application ce qu’il a appris pour rester à sa juste place”, car “le souverain doit occuper pleinement sa place de souverain, le sujet pleinement sa place de sujet”.
Le Néo-Confucianisme : synthèse entre Confucianisme, Taoïsme et Bouddhisme
Le néo-confucianisme, explique Stéphane Feuillas, “se présente en fait comme une sorte de relecture nouvelle du confucianisme ancien qui intègre la pensée taoïste et la pensée bouddhique”. Conscients, au XIe siècle, d’être “assez mal équipés pour penser en fait le monde et la nature”, les néo-confucéens “vont emprunter aux taoïstes un certain nombre de conceptions”, notamment autour de “la conception de la transformation” et de la question fondamentale : “Qu'est-ce que c'est que la voie, le cours des choses ? La voie, comment la penser ?”. Mais ils sont aussi “démunis sur un autre plan, qui est le plan de la conscience”, et trouvent dans le bouddhisme des éléments pour “penser l’esprit ou la conscience individuelle”. Néanmoins, ils se considèrent comme “un prolongement, en fait, et une explicitation de ce qui peut paraître dans le confucianisme ancien encore très implicite”.
Pour en parler
Olivier Boutonnet, sinologue, docteur en histoire des religions et anthropologie religieuse à l’EPHE. Il mène des recherches sur l’histoire du taoïsme et des religiosités lettrées dans la Chine médiévale.
Stéphane Feuillas, ancien élève de l’ENS, professeur de littérature et philosophie de la Chine ancienne au sein de l’université Paris-Cité. Il est spécialisé dans le renouveau littéraire et théorique de la dynastie des Song.
- Traduction de Su Shi, Commémorations, Les Belles Lettres, 2010.
- Traduction de Lu Jia, Nouveaux discours, Les Belles Lettres, 2012 (avec la collaboration de Béatrice L’Haridon).
Références sonores
- Extrait de la pièce de théâtre Confucius, de Pham Van Ky, réalisée par Herzog Gérard, le 6 février 1958, RTF avec Roger Blin (Confucius)
- Mencius (IVe siècle av JC) sur la bonté de la nature humaine, Mencius, chapitre II, 1ère partie, § 6, traduction Léon Vandermeersch, in La Voie Royale, vol. II, p. 517-518.
- Xunzi [prononcer Souen Tseu (310-235 av. J.-C.) sur la nature humaine mauvaise, traduction Rémi Mathieu, in Philosophes Confucianistes, la Pléiade, p. 1172-1188.
- Archive de Vincent Goossaert, historien du taoïsme, “La matinée des autres” sur France Culture, le 7 novembre 2000
- Archive de Ke Wen, association Les Temps du Corps, “Les vivants et les dieux” sur France Culture, le 7 avril 2001
