Situé à une trentaine de kilomètres de Bréhat et de Guernesey, le phare des Roches-Douvres est le phare d'Europe le plus éloigné des côtes. Automatisé depuis 2000, il faisait partie des sept derniers phares encore gardés lorsque Yann Paranthoën y séjourne pendant une semaine, en 1996, pour la réalisation d'un documentaire diffusé sur France Culture. Il y évoque le quotidien des gardiens de ce phare et la reconstruction de ce colosse de granit s'élevant à près de 70 mètres au-dessus de la mer, détruit en 1944 par les Allemands et rallumé le 14 juillet 1954, au terme d'un chantier titanesque de sept années, difficile et dangereux, raconté ici par certains de ceux qui y travaillèrent.
Pendant deux heures, Yann Paranthoën entrelace la vie sur le phare et à terre, le présent et le passé. Il fait entendre la houle, les oiseaux, le vent dehors, et les sons, les bruits et le silence dans phare ; il fait ressentir la vie, avare de paroles, partagée entre les deux gardiens qui, d’une relève à l’autre, passent la moitié de l’année à quelques kilomètres seulement, mais si loin, de leurs familles ; la solitude au milieu de la mer, propice à la rêverie, la méditation, la lecture ; les jours et les nuits, rythmés par les heures de quarts, les repas et les tâches à accomplir, avec toujours un œil sur le temps qu'il fait et le bon fonctionnement des machines… Magnifiquement enregistrée et mixée, c'est un peu de la vie des derniers gardiens du phares des Roches-Douvres que Yann Paranthoën donne à entendre dans ce documentaire diffusé pour la première fois le 24 décembre 1996 sur France Culture.
Dans le phare
Dominique, l’un des gardiens, décrit ses activités dans le phare : "C’est un lieu qui se prête à des tas de choses : bricolage, lecture… J’ai été pendant des années passionné de maquettes, et les bateaux en bouteilles, c’était quasiment la tradition dans les phares. J’ai fait ça des années, toujours en dessinant et en peignant un petit peu, mais c’était surtout les maquettes qui primaient. Et depuis une dizaine d’années, je suis à fond dans la peinture."
À terre
Les épouses s’habituent au rythme de leur mari gardien de phare, qui part deux semaines, revient pour une semaine, repart une semaine, revient une semaine… "Quand il rentre, le premier jour, c’est dur, je demande aux enfants de ne pas faire trop de bruit. Il lui faut deux jours pour vraiment "revenir", pour se réintégrer à la vie coutumière. Et le week-end, dans sa tête, il est presque déjà reparti au phare. Il a du mal à rester chez lui, il tourne, il vire… Il ne fonctionne pas vraiment comme tout le monde."
La reconstruction après-guerre
Le phare, érigé en 1868, a été entièrement reconstruit à partir de 1947. Un ancien raconte : "Nous étions quinze sur le chantier, cuistot, mécanicien, manœuvres... On nous apportait des blocs déjà aux mesures, numérotés, à assembler, et un tailleur de pierre venait parfois, pour faire des retouches. C’est du granit rose de Lézardrieux, bien taillé, sans aspérités, extrait des profondeurs, il est impossible de l’attaquer. Il y avait même une forge sur place, pour les outils : le tungstène n’existait pas, c’était de l’acier trempé."
- Par Yann Paranthoën
- Réalisation Yann Paranthoën
- Avec Philippe Camuzard, Dominique Boclé et François-Jouas Poutrel (gardiens du phare des Roches-Douvres), Pascale, Christiane et Françoise
- Le phare des Roches-Douvres (1ère diffusion : 24/12/1996)
- Edition web : Valérie Ernould, Documentation de radio France