C'est un monde qui nous fait rêver. Pas seulement parce que c'est celui des Mille et une Nuits. C'est aussi la rapidité de cette chronologie. En 622, l'Hégire Mahomet quitte La Mecque et s'enfuit à Médine. 140 ans plus tard est fondée la ville de Bagdad.
La naissance de Bagdad
En 750, les Abbassides, descendants de l'oncle de Mahomet, renversent la dynastie des Omeyyades et accèdent à la tête de l'Empire islamique. Dix ans plus tard, le calife al-Mansûr décide de déplacer la capitale impériale de la Syrie vers l'Irak, et fonde Madînat al-Salâm, "la ville du salut". La nouvelle cité prend ensuite le nom de Bagdad, probablement d'après l'appellation d'un village ou d'un marché préexistant.
Le choix de l'emplacement est stratégique. Située sur les rives du Tigre et à moins de cinquante kilomètres de l'Euphrate, Bagdad est à la croisée des mondes méditerranéens et indo-iraniens. La ville offre à l'Empire des débouchés vers le golfe Persique et l'océan Indien pour l'échange de marchandises et la circulation de voyageurs. Pour l’historienne Vanessa Van Renterghem, l’une des principales caractéristiques de la Bagdad médiévale, c’est son caractère cosmopolite : "Nous y retrouvons un véritable mélange de langues, à l’époque nous pouvions très probablement y entendre non seulement l’arabe mais également le turc, le persan, le kurde, le syriaque, et d’autres langues encore pratiquées dans la région".
Un carrefour des savoirs
Capitale politique et économique, Bagdad se révèle également être un haut lieu de savoirs du monde islamique. Les califes et leur entourage encouragent par le mécénat la recherche et la traduction de textes scientifiques grecs mais aussi indo-persans, ce qui favorise l'épanouissement d'une tradition scientifique arabe à part entière. L’historien Gabriel Martinez-Gros évoque plus précisément ce large mouvement de traductions grecques vers l’arabe commencé à Bagdad au XIIe siècle : "C’est la première fois qu’un pouvoir politique prétend rassembler la totalité des savoirs de l'humanité par un mécénat d'État. Au IXe siècle, les califes abbassides vont encourager, voire commander la traduction d'œuvres de l’Antiquité. Il s’agit vraiment de rassembler un patrimoine humain au profit du califat".
Ville cosmopolite, Bagdad réunit des savants venus de tout l'Empire, polyglottes et porteurs de traditions plurielles, qui échangent en arabe et enrichissent les savoirs en astronomie, philosophie, mathématiques ou encore en médecine.
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Le Pourquoi du comment : l'histoire
Toutes les chroniques de Gérard Noiriel sont à écouter ici.
Pour en parler
Gabriel Martinez-Gros est professeur émérite d’histoire médiévale à l’Université Paris Nanterre.
Il a notamment publié :
Vanessa Van Renterghem est maîtresse de conférences au Département des Études arabes de l'INALCO.
Elle a notamment publié :
Références sonores
- Extrait du documentaire "Science grand format : Babylone, la cité des merveilles", France 5, 2020
- Lecture du Livre des pays d'al-Yaʿqūbī par Jeanne Delecroix, IXe siècle
- Extrait du film Le Destin de Youssef Chahine, 1997
- Chanson Il n'y a pas d'amour éternel par Nouna el Hana, 2013
- Générique de l'émission : Origami de Rone