Alors que les députés européens ont décidé le mois dernier de décerner le Prix Sakharov pour la liberté de l'esprit à Alexeï Navalny, l’opposant au Kremlin est incarcéré depuis janvier 2021 dans une colonie pénitentiaire depuis son retour en Russie. Il est accusé d’avoir enfreint des mesures de contrôle judiciaire, alors même qu’il était en convalescence en Allemagne et après avoir survécu à une tentative d’empoisonnement au Novitchok par des agents russes.
Comment va Alexeï Navalny et quelles sont ses conditions de détention ? Pourquoi est-il incarcéré aujourd’hui ? En quoi représente-t-il une menace si inquiétante pour le pouvoir ? Alors qu’il est enfermé, comment se poursuit son combat contre la corruption ?
Quand il était en liberté, Alexeï Navalny était un grand spécialiste d’Internet. Sa source principale d’information et son espace d’action étaient l’espace numérique (…) et les vidéos qu’il tournait constituaient un espace médiatique alternatif par rapport à la télévision officielle russe. Françoise Daucé
Navalny est un occidentaliste, qui considère que la Russie n’est pas une civilisation séparée de l’Occident (…) et qu’il n’y a aucune raison expliquant que la Russie ne pourrait pas bénéficier d’institutions dont les citoyens d’Europe occidentale jouissent : une économie de marché, un Etat-providence, un Etat de droit libéral et démocratique … Morvan Lallouet
Florian Delorme reçoit Morvan Lallouet, doctorant en politique comparée à l’University of Kent (Canterbury, UK) et Françoise Daucé, directrice de recherche à l’EHESS, directrice du Centre d'études des mondes russe, caucasien et centre-européen (CERCEC).
Seconde partie : le focus du jour
"Fearless : The Women Fighting Putin"
Sarah Collinson est journaliste pour la section film de The Economist. En amont des élections de septembre, elle a passé cinq mois à suivre trois femmes, opposantes à Poutine, dans différentes villes de Russie. A Mourmansk, une ville tout au nord du pays, elle a suivi Violetta Grudina, une femme de 31 ans, membre de l’organisation de Navalny. Cet été, elle a tenté de participer à un scrutin local comme candidate indépendante, puisque l’organisation de Navalny a été démantelée. Sarah Collinson nous explique comment le parcours de Violetta Grudina témoigne des stratégies mises en place par le régime, notamment par l’utilisation de la pandémie, pour entraver les opposants politiques.
Poutine a tellement peur de perdre sa place qu’il élimine purement et simplement quiconque représente la moindre menace pour son régime. Pour Violetta Grudina, son expérience n’est qu’une partie du panorama général de la répression grandissante en Russie. Sarah Collinson
Avec Sarah Collinson, journaliste à The Economist. Ses articles et reportages sont à retrouver, en anglais, sur le site de _The Economist. _
Références sonores
- Extrait de la dernière vidéo tournée par Alexeï Navalny dans un commissariat de Moscou après son arrestation à l’aéroport le 17 janvier dernier (France 2, extrait du documentaire « Navalny, le survivant » de Pierre Monégier, Luc Lacroix et Max Paquereau, diffusé dans Envoyé spécial le 25 février 2021)
- Extrait de l’annonce de l’attribution du prix Sakharov à Alexeï Navalny par Roberta Metsola, la vice-présidente du Parlement européen le 20 octobre dernier (Vidéo du Parlement européen, 20 octobre 2021)
- Depuis Freiburg en Allemagne, Alexeï Navalny et son équipe ont piégé Konstantin Koudriavtsev, le chimiste de l’équipe du FSB qui a participé à son empoisonnement (France 2, extrait du documentaire « Navalny, le survivant » de Pierre Monégier, Luc Lacroix et Max Paquereau, diffusé dans Envoyé spécial le 25 février 2021)
- Extrait de la vidéo d’Alexeï Navalny dans laquelle il évoque le « Palais de Poutine » peu avant son retour en Russie (Mediapart, 09 février 2021) + réaction de Vladimir Poutine suite à ces accusations (France 24, 25 janvier 2021)
- Extrait du film « Fearless : The Women fighting Putin » de Sarah Collinson dans lequel on entend Violetta Grudina être emmenée de force par des infirmiers et des policiers vers l’hôpital où l’on traite les malades du COVID
- Interview de Sarah Collinson par Bertille Bourdon (durée : 7’26)
Références musicales
- « The Splendour » de Pantha du Prince (Label : Rough Trade)
- « Ruchey » de l’artiste pétersbourgeoise Soft Blade (Label : autoproduit)Feaer"