La prise en charge de l’avortement, et avant lui de la contraception, a bouleversé le corps médical. Depuis plusieurs siècles, l’interdit de l’avortement pesait particulièrement sur la profession, mettant en danger des milliers de femmes. Olivier Bernard se souvient “Pendant mes études, j'ai fait mon stage d'externat en réanimation médicale. Et là, ça a été le choc de constater qu'en 1972, les services de réanimation médicale étaient peuplés majoritairement de jeunes femmes qui étaient là entre la vie et la mort. J'ai été bouleversé du mépris du jugement du corps médical par rapport à elles. On laissait entendre qu'elles l'avaient bien cherché.
Sa répression s’accompagnait de poursuites et de peines pour les personnes le pratiquant. C’est seulement depuis 1975, avec le vote de la loi Veil que l’avortement est passé du domaine privé au domaine public. La loi de santé publique votée après des débats houleux à l’Assemblée nationale a médicalisé l’avortement. Le corps médical constitue depuis le pivot essentiel de cet acte, même si ”Au moment du vote de la loi, la majorité du corps médical était opposée à l'avortement et nataliste. Et c'est pour ça que la loi de 75 a été votée. En confiant l'avortement aux médecins, on pensait qu'ils allaient pouvoir les dissuader d'avorter. Il y avait toujours cette mentalité nataliste”, précise Michèle Ferrand.
Après 40 ans de silence, Marie se souvient de son avortement. Ça s’est passé à Grenoble dans une chambre d’étudiante, c’était le début de la fameuse méthode Karman et Anne Joubert ne doute pas “On n'avait pas peur. Il y avait bien une culpabilité. Je pense qu'on avait vraiment l'intime conviction qu'on était dans notre droit. Ce n'était pas légal, mais notre combat était légitime.”
Avec :
- Marie
- Olivier Bernard, médecin généraliste, orthogéniste et ancien président du mouvement pour la liberté de l'avortement et de la contraception (MLAC) de Grenoble
- Joëlle Brunerie, gynécologue et militante féministe française
- Marie-Laure Brivale, gynécologue obstétricienne, cheffe de service de la maternité des Lilas jusqu’à fin 2018
- Michelle Ferrand, sociologue, directrice de recherche émérite du CNRS
- Anne Joubert, militante du mouvement pour la liberté de l'avortement et de la contraception (MLAC)
- Lucile Ruault, sociologue chercheuse au CERAPS de l’université de Lille
- Jean-Yves Le Naour, historien, spécialiste de la Première Guerre mondiale et de l'histoire du XXe siècle
Merci à Marielle Issartel, à Bibiad Pavard et à la bibliothèque municipale de Lyon Pardieu
Archives du film Histoire d’A, de Charles Belmont et Marielle Issartel et Regarde, elle a les yeux grand ouverts, réalisé par le Collectif de femmes MLAC, Yann Le Masson (écrit par Collectif de femmes MLAC, Yann Le Masson).
Un documentaire de Johanna Bedeau, réalisé par Angélique Tibau