Syracuse

Quels liens existent-ils entre le surréalisme et le Parti Communiste au milieu des années 1920 ? Peut-on parler d'affinités ou d'un malentendu ? En 1952, André Parinaud réserve seize entretiens à André Breton diffusés sur la Chaîne Nationale. Dans ce dixième épisode, considéré peut-être comme l'un des plus passionnants de la série, le poète et écrivain explique la rencontre inéluctable avec la révolution marxiste-léniniste ainsi que l'échec de leur union. Ces années très politiques n'entament en rien l'intégrité et la vitalité du mouvement surréaliste et donnent naissance à de nombreuses œuvres artistiques et poétiques d'une grande richesse.

"Il est indubitable que le marxisme porte, au moins jusqu'à l'époque qui nous occupe, la plus grande chance de libération des classes et des peuples opprimés"

André Breton aborde la question politique et son interaction avec le mouvement surréaliste. "En matière de transformation sociale du monde, les considérations d'urgence primaient toutes les autres. L'outil voulu pour cette transformation existait et avait fait ses preuves, il s'appelait : le marxisme-léninisme". Mais était-ce possible pour les surréalistes de s'engager plus avant dans l'action politique ? "Je pense que nous ne l'aurions pas pu. Nous aurions été repris par la sollicitation surréaliste qui s'est montrée extrêmement vive et de nature irrépressible. Nous n'étions prêts à donner à une activité rationaliste et disciplinée qu'une part de notre esprit."

La quête d'un "hasard objectif", une convergence vers l'amour

Durant ces années 1926-1929, le goût de l'aventure, la poursuite de l'imprévu imprègnent en profondeur les esprits surréalistes. Une aventure dans le langage mais aussi dans la rue, dans le rêve. Le récit autobiographique Nadja d'André Breton rend compte de cette atmosphère psychologique "où le goût d'errer est porté à ses extrêmes limites. Une quête ininterrompue s'y donne libre cours. Il s'agit de voir, de révéler ce qui se cache sous les apparences." Cette attitude s'exprime déjà quelques années auparavant dans S'il vous plaît, une pièce de théâtre co-écrite avec Philippe Soupault donnée lors d'une manifestation Dada et publiée en 1920 dans la revue Littérature. Quant au sujet incontournable de l'amour chez les surréalistes : "Les plus beaux poèmes d'Éluard, de Desnos, de Baron, publiés à cette époque, sont des poèmes d'amour."