Syracuse

Il y a quelque chose de frappant dans le langage ordinaire : nous disons parfois des uns des autres que telle personne est “rangée”, nous entendons par là quelqu’un de bien ordonné, qui entre dans le rang, et telle autre serait “dérangée”, cela est un diagnostic sur un type d’esprit qui peut aller jusqu’à un terme ordinaire pour désigner la folie la plus grave, mais peut désigner des faits minimaux, comme un enfant qui ne range pas sa chambre, ou un adulte qui a un bureau désordonné. Il y aurait donc deux sortes d’esprits.

Pourquoi ne pas conclure trop vite à un "dérangement" ?

Bien sûr, on peut critiquer cette opposition des esprits ordonnés et des esprits désordonnés. Ainsi, on pourrait reprendre la critique de l’idée de désordre de Bergson, qui montre bien que le désordre pour notre pensée n’est qu’une autre forme d’ordre dans la réalité des choses. Bergson prend l’exemple d’une chambre mal rangée : elle n’est mal rangée que pour quelqu’un qui a une idée de l’ordre absolument mécanique, mais la personne qui vit dans cette chambre sait parfaitement où sont les choses. Le philosophe Jean Wahl par exemple était connu pour le désordre de son bureau. Pourtant, s’il cherchait un livre ou une feuille de papier, il pouvait la trouver, tandis que pour trouver son téléphone, il allait dans une cabine téléphonique, et c’est la sonnerie qui sous la pile de papier lui indiquait où était son téléphone. Il était donc désordonné, mais était-il “dérangé” ? (...)

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