Dans cet épisode, des Egyptiens nous racontent leur attachement à leur passé antique, les permanences de coutumes dans leur vie quotidienne ou combien cette question est loin de leurs préoccupations quotidiennes.
Gihane Zaki, nous raconte ainsi la permanence d'une coutume de l’Egypte ancienne dans l’Egypte d’aujourd’hui : “Pour un enterrement, les trois premiers jours, la famille se rend sur la tombe pour faire la distribution de ce qu'on appelait avant dans l'Égypte antique, les offrandes. Il s’agit de fruits, et de pains avec des formes particulières. Ce qui est intéressant, c'est que les formes de ces pains qui sont présentés aujourd'hui lors des funérailles, sont représentés à l’identique sur les parois des tombes, comme celles de Saqqarah, par exemple. C'est une similarité très frappante, si l'on pense qu’il y a 3000 ans d'écart”.
Khaled El-Enany indique également : “Tout ce que font les chrétiens et les musulmans égyptiens, pour célébrer une naissance ou pour des funérailles, est très influencé par les pratiques pharaoniques. Même les musulmans, pour célébrer l'arrivée du ramadan, chantent encore aujourd’hui, un chant, en arabe, sans savoir qu'ils chantent des mots et des chants des anciens Egyptiens pour célébrer la lune”.
Entre fierté réelle, nationalisme renouvelé, critique du « pharaonisme », comment les Egyptiens contemporains se sentent-ils ou non descendants des Pharaons ?
Nombre d’entre eux n’ont pas pu s’exprimer tant la peur de la répression est active et diffuse dans la société.
Dans un pays pétri de difficultés économiques, l’héritage pharaonique est un enjeu politique, touristique et économique immense. Au gré des événements, il peut servir de ferment national, de repoussoir de la toute-puissance ou de faire-valoir de celle-ci. Ainsi, Frédéric Mougenot explique : “Ce dont on se rend compte quand on étudie l’histoire du rapport des égyptiens au passé pharaonique est l'utilisation de ce passé par les gouvernements égyptiens à partir du XXᵉ siècle. Les égyptiens mobilisent les figures pharaoniques à chaque fois qu'ils veulent unir la nation autour d'une référence commune qui fait consensus. Et les pharaons sont très pratiques pour ça, parce qu'ils dépassent le clivage musulman chrétien”.
Deux générations après le panarabisme nassérien, dix ans après la révolution de la place Tahrir qui a fait tomber Moubarak puis vu les Frères musulmans au pouvoir, comment l’Egypte du maréchal Al-Sissi présente-t-elle l’héritage du plus célèbre des pharaons ?
Un documentaire d'Elise Gruau, réalisé par Diphy Mariani.
Avec :
- Gihane Zaki, professeure d’égyptologie, chercheuse au CNRS et membre de l’ICCROM (Centre international d'études pour la conservation et la restauration des biens culturels)
- Marc Lavergne, géopolitologue spécialiste du Moyen-Orient, directeur de recherche émérite au CNRS
- Ola Galal, chercheuse en politique d'Etat au Moyen-Orient à l'université de New York
- David Trétiakoff, réalisateur, auteur du documentaire A God Passing sur la nuit du transfert du colosse de Ramsès au Caire.
- Khaled El-Enany, ministre des Antiquités et du tourisme de l’Egypte jusqu’en septembre 2022, égyptologue
- Frédéric Mougenot, conservateur des Antiquités
Merci à Fatma Keshk, Hassan Selim, Laurent Coulon, Mathieu Gousse et à l**’IFAO (Institut français d’archéologie orientale au Caire).
Merci aussi à Martin Roux et Edouard Dropsy.
Prise de son : Patrick Müller, Laurent Césard, Jean-Louis Deloncle, Thibault Nacimben, Nadège Antonini - Mixage : Eric Villenfin
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