Au CHU de Montpellier, dans l’unité de soins Urgence et Post-Urgence Psychiatrique de l’hôpital Lapeyronie, des patients viennent en consultations spécialisées et répondent aux questions du Dr Lacambre.
Dans ce centre ressource pour les intervenants auprès des auteurs de violences sexuelles toute l’équipe tente d’apporter des soins pour les personnes présentant des déviances ou perversions sexuelles. Linda Tromeuleue, psychologue clinicienne évoque leur profil : “ Si je reste sur une approche psychologique, ce qui est constaté, c'est un problème narcissique de très, très grande envergure chez quasiment chacun d'entre eux, ce sont des sujets souvent très égocentriques, très centrés sur eux-mêmes, rigides, qui ne critiquent pas leur manière de voir et d'appréhender les choses. “ Par ailleurs, elle ajoute que ces sujets “ ont un rapport pathologique au secret. On pourrait même dire à la vérité. Si bien d'ailleurs que lorsque nous les prenons en charge, ils se taisent. Ils dissimulent, ils minimisent, ils banalisent. “
Outre les entretiens individuels et la thérapie de groupe certains sont aidés de médicaments anti-androgènes, ou via une reprise de parole avec la famille. Ouvert depuis une dizaine d’années, le service assiste à des demandes qui ne cessent d’augmenter, en 2021, plus de 400 personnes ont été suivies. Ainsi, le Dr Mathieu Lacambre explique : “ Il s’agit de patients qui sont orientés soit par la justice ou après une condamnation pour avoir commis une infraction à caractère sexuel depuis la cyber pédopornographie jusqu'à des agressions sexuelles sur mineurs ou des viols. Et puis, on a une petite portion congrue qui est en train d'augmenter progressivement, d'année en année, de patients qui viennent spontanément. “
En France, cette clinique de la prévention, au carrefour de la psychologie et de la criminologie, est compliquée à mettre en marche, tant il existe des réticences de la société à s’occuper des agresseurs comme le confirme la psychiatre Magali Bodon “ Bien sûr qu'il faut prendre en charge les auteurs pour qu’il y ait moins de récidives, qu'il y ait moins d'actes et moins de victimes. Mais, je crois que très honnêtement, il y a quelque chose de l'ordre d’une résistance. Ça passe moins bien de s'occuper des auteurs quand même. “
Un documentaire de Johanna Bedeau, réalisé par Marie-Laure Ciboulet
Avec :
- Dr Mathieu Lacambre, psychiatre et responsable de la filière de psychiatrie légale au CHU de Montpellier, l’Hôpital Lapeyronie et les patients
- Magali Bodon Bruzel, psychiatre
- Linda Tromeleue, psychologue clinicienne
Merci à toute l’équipe du CRIAVS de Montpellier ; au CHU de Montpellier ; à l’Hôpital Lapeyronie ; à la maison d'arrêt de Villeneuve-Lès-Maguelonne ; à Colombe Babinet et à l’administration pénitentiaire.
Liens
L'incesteur mène une vie que rien ne différencie des autres : entretien avec l’anthropologue Dorothée Dussy à lire dans le Journal du Cnrs, mars 2021.
Paul-Claude Racamier : L'incestuel, In Empan, n°62, 2006.
Nécessité et efficacité d’une approche intégrée dans le traitement de l’inceste : article de Gilles David, paru dans la revue québécoise Service social, vol. 36, n°2-3, 1987.
Accompagner un mineur auteur d’infractions sexuelles dans sa fratrie « Une prise en charge comme les autres ? ». Mémoire de Ludivine Dubart, université de Lille-3, 2011.
La justice restaurative : une voie de résilience pour auteurs et victimes d’actes pédophiles, par Thérèse de Villette, In Revue d’éthique et de théologie morale, n°306, 2020.
Inceste : traiter les agresseurs pour éviter la récidive. Article de Marie Le Marois paru dans Marcelle, janvier 2021.