La plupart des tentatives ont eu lieu dans les premières années du Mur : la Stasi perfectionnait sans cesse ses moyens de détection, et à partir de 1971, c’était totalement voué à l’échec.
Les Berlinois, dans leur malheur, avaient plutôt de la chance, géologiquement : le sous-sol est relativement meuble et stable. Si la ville avait été bâtie sur du granit, il ne serait pas question de ce sujet. Joachim Neumann, perceur de tunnels récidiviste, nous explique : "la motivation de creuser des tunnels était de plusieurs natures. Les gens étaient indignés. Tout le monde se disait "Il faut faire quelque chose". J’avais des amis qui étaient restés à Berlin-Est et je leur avais promis que si j’arrivais à passer à l’Ouest je ferais tout pour les aider. J’étais engagé par cette promesse. On m’avait aidé à passer à Berlin-Ouest, j’étais donc redevable, je devais le faire."
Joachim Neumann est passé à l’Ouest dès la fin de l’année 1961, grâce à un passeport suisse, avec la ferme volonté d’aider ensuite ses amis restés à l’Est, dont sa chérie. Pour elle, il a creusé quatre tunnels d’environ 140 mètres chacun, ce qui représente cinq mois de travail à chaque fois, pour une équipe de vingt personnes. La quatrième tentative a été la bonne. Elle porte le nom de Tunnel 57, parce que 57 personnes ont pu s’évader par ce moyen, les soirs des 3 et 4 octobre 1964. "Au cours de la première nuit d’ouverture du Tunnel 57, les fugitifs sont arrivés les uns après les autres. Soudain un des nôtres est arrivé, soutenant une jeune femme. Il me l’a mise dans les bras en me murmurant "Fais attention, elle est très nerveuse". Quand je l’ai eue dans les bras, je me suis aperçu que c’était ma copine." Joachim Neumann
Pour en parler
- Marc Boucher, de l’association Berliner Unterwelten (les mondes souterrains de Berlin)
- Dietmar Arnold, de l’association Berliner Unterwelten (les mondes souterrains de Berlin)
- Joachim Neumann, perceur de tunnels récidiviste
- Michael Baade, écrivain, ami d’Egon Schultz
Traduction, Marie Heck et Françoise Schmidt. Voix françaises, Michel Vivier, Jean-Georges Brunet, Nathalie Duong et Renaud Bertin.
Remerciements à : l’association Berliner Unterwelten (les mondes souterrains de Berlin), dont le précieux travail nous permet de raconter cette histoire - Hassane M’Béchour et Marie Chartron de France Culture - Les éditions Christoph Links Verlag - L’Institut français de Berlin - Les archives de la Radiodiffusion Allemande - Dominique Radanyi du services des Relations internationales de Radio France.
Générique
Un documentaire d'Olivier Chaumelle, réalisé par Lionel Quantin. Prise de son, Thibault Nascimben à Berlin, Julien Doumenc à Paris. Mixage, Philip Merscher. Archives Ina, Véronique Jolivet. Archives de la Radiodiffusion Allemande (Deutsches Rundfunkarchiv), Monika Fickert. Documentation d'actualité de Radio France, Patricia Mihura. Avec la collaboration d'Annelise Signoret de la Bibliothèque de Radio France. Nouvelle page web, Sylvia Favre.
Bibliographie sélective
- Les Tunnels de la liberté. Les évasions sous le Mur de Berlin, dont Kennedy voulait censurer les images, Greg Mitchell et Cécile Dutheil de la Rochère (Grasset, 2018)
- Der Tod des Grenzsoldaten – Egon Schultz, der Tunnel und die Propagandalüge (La mort du garde-frontière – Egon Schultz, le tunnel et les mensonges de la propagande), Michael Baade (Christoph Links Verlag, 2015)
- Unterirdisch in die Freiheit (Vers la liberté par le sous-sol), Dietmar Arnold et Sven-Felix Kellerhoff (Christoph Links Verlag, 2015)
- Wege durch die Mauer – Fluchthilfe und Stasi zwischen Ost und West (Chemins à travers le Mur – Les passeurs et la Stasi, de l’Est à l’Ouest), Burkhart Veigel (Christoph Links Verlag, 2015)
- Frei (Libre), Burkhart Veigel (Europa Verlag, 2018)
- 188 mètres sous Berlin, Magdalena Parys (Agullo, 2017)
Pour aller plus loin
- The Berlin Wall, remarquable projet multimedia autour du Mur de Berlin. Chronologie, cartes, parcours interactifs, reportages vidéo comme celui-ci consacré à la spectaculaire évasion de 57 personnes par un tunnel (qu’on surnomme depuis le Tunnel 57) entre le 3 et le 5 octobre 1964.
- Association Berliner Unterwelten (Les mondes souterrains de Berlin)
- Gedenkstätte Berliner Mauer (Mémorial du Mur de Berlin)
- Stasimuseum (musée de la Stasi)
Rediffusion du 20 octobre 2018