En Thaïlande, la légitimité royale semble s’être considérablement émoussée depuis l’arrivée sur le trône de Rama X, succédant à son père - le très populaire Bhumibol Adulyadej - mort en 2016 après 70 ans de règne. Résidant le plus souvent en Allemagne - où il est resté toute la durée du confinement, soulevant de nombreuses critiques - le nouveau monarque a pris à son propre compte le fonds d’investissement de la monarchie, jusqu’alors géré par le ministère des Finances. De quoi susciter la méfiance de la population thaïlandaise, alors même que celle-ci considère la royauté comme garante de la stabilité de l’Etat, dans un pays où les crises politiques se sont succédé.
Qui sont les manifestants pro-démocratie thaïlandais, et comment leur critique de la monarchie s’articule-t-elle ? Le système constitutionnel est-il remis en question ? Comment le roi se positionne-t-il face à ce mouvement ? Dans quelle mesure est-il soutenu par le reste de la classe politique et par l’armée ?
Ce qui a mis le feu aux poudres, c'est la dissolution, le 23 février 2020, du parti « Future Forward », qui était très populaire parmi les jeunes urbains éduqués. Il a été dissous pour une raison de droit : la Cour constitutionnelle a considéré qu'un prêt de 5 millions effectué par son dirigeant était en réalité un don déguisé. Bien sûr, c'est une décision qui n'était pas totalement neutre. Marie-Sybille de Vienne
Le roi Bhumibol [Rama IX], qui était considéré comme le père de la nation, a été remplacé par un fils qui représente le contraire. Il n'est pas considéré comme un roi bienveillant mais plutôt comme un roi qui néglige son peuple - le fait qu'il reste en Allemagne pendant la crise du Covid a par exemple provoqué la diffusion d'un hashtag, sur les réseaux sociaux, intitulé « Where is the king? » David Camroux
Le conflit séparatiste du sud de la Thaïlande est historiquement marqué par l'annexion du grand Sud au Royaume thaïlandais, majoritairement bouddhiste, en 1904. S'en sont suivies, dans les décennies suivantes, une série de réformes où il y a eu des tentatives de moderniser, de créer une certaine unité de l'État thaïlandais, reposant sur trois piliers : nation, religion, et monarchie. Et le problème qui s'est posé, dans le cas du grand Sud, c'est que cette partie de la Thaïlande, à l'époque, avait sa propre monarchie, sa propre religion, sa propre nation. **Virginie André **
Extraits sonores
- Témoignage d’Anon Nampa, jeune avocat figure du mouvement pro-démocratie, le 03 août à Bangkok (Wion TV, chaine de TV basée en Inde 18 août 2020)
- Témoignage d’une jeune Thailandaise lors d’une manifestation à Bangkok début août (RTBF, 11 août 2020)
- Témoigange de Panusaya Sithijirawattanakul étudiante activiste thailandaise (TV5 Monde, 05 septembre 2020)
- Extrait du discours de Rama X lors de son couronnement en mai 2019 (France 24, 4 mai 2019)
- Islamisme à Pattani : témoignage du frère d’une victime de fusillade (extrait de « Thaïlande, à l'ombre du Paradis » de Patrick Chauvel, Envoyé Spécial, 2017)
Extraits musicaux
- « Held » de Kiasmos (Label : Erased tapes)
- « ถึงผู้มีส่วนเกี่ยวข้อง » Rap Against Dictatorship, extrait de la compilation sortie en 2018 « Rap against Dictatorship » regroupant des rappeurs et musiciens thaïlandais opposés à la Junte militaire (Les rappeurs : Liberate P, Nazesus et GSUS2)
