Syracuse

L'idéologie chrétienne développe au Moyen Âge une vision ambigüe, quoique plutôt négative, à l'égard du travail. Une vision qui va évoluer avec la croissance démographique et économique du XIIe siècle, où le développement des villes appelle une structuration des métiers, comme l’évoque l’historienne médiéviste Julie Claustre : “A partir du XIe, XIIe siècle, les artisans quittent les châteaux pour aller dans les villes et dans des bourgs où ils vont s’installer en atelier. C’est une sorte de prise d'autonomie spatiale et sociale. Dans les villes se créent alors des formes d'organisation de sociétés urbaines qui laissent une plus grande part au travail, à l'organisation des travailleurs, et donc aux organisations des travailleurs.”

La demande de produits et de services est forte. C'est la naissance de l'apprentissage et d'une certaine exigence de qualité, de la spécialisation des métiers aussi, qui ont essaimé jusqu'à nos jours. Les travailleurs et leurs produits font l'objet de contrôles. En 1268, Le Livre des métiers d'Etienne Boileau codifie l’ensemble du monde du travail non agricole comme l’explique Julie Claustre : “C’est la compilation, le recueil des règlements de plus de 120 métiers parisiens. Bien qu’à l’époque il le présente comme un règlement des communautés professionnelles, on pourrait déjà parler d’une réglementation du travail. Sous certains aspects, le livre protège d’ailleurs les travailleurs en établissant des contraintes pour les maîtres des ateliers, c’est donc d’une certaine façon la création des conventions collectives ”.

Cette structuration des métiers génère une prise de conscience, qui place le travail au cœur de la société médiévale. Et plus encore quand, au XIVe siècle, la Peste noire provoque une pénurie de main d'œuvre, où l'on va fustiger celles et ceux qui ne se soumettent pas à la loi nouvelle du travail...

Un documentaire de Stéphane Bonnefoi réalisé par Anne Perez.

Avec :

Julie Claustre, médiéviste, Maître de conférences à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Mathieu Arnoux, médiéviste, professeur d'histoire médiévale à l'Université Paris Cité depuis 1998 Directeur d'études Histoire et civilisations (EHESS)

Sylvain Piron, médiéviste, Responsable du parcours de spécialisation « Etudes médiévales » du Master de l'EHESS

Georges Bonnebas, historien médiéviste

Félicité Schuler-Lagier, médiéviste, enseignante et conférencière au Centre international du vitrail de Chartres

et les frères Philippe, Benoît et Lucien de l'abbaye cistercienne de Citeaux.

Prise de son : Yann Fressy - Documentaliste : Annelise Signoret et Antoine Vuilloz - Mixage : Pierre Henry

Bibliographie :

* Mathieu Arnoux, Le temps des laboureurs, Albin Michel

* Sylvain Piron, L'occupation du monde, Zone sensibles

* Julie Claustre, La fin du Moyen Âge, Hachette

* Michel Lauwers, Labeur, production et économie monastique dans l'occident médiéval, Brepols

* Mathieu Arnoux, Un monde sans ressources, Albin Michel

Liens :

• Centre international du vitrail à Chartres
• Abbaye de Cîteaux
• Simon Hasdenteufel : Le travail au Moyen Âge, entre enfer et paradis, in L'information psychiatrique, vol. 95, n°5, 2019.
• Histoire du regard moral porté sur le Travail du Moyen Age au XVIIIe siècle. Article de Léonard Barbulesco-Vesval, paru dans Le Comptoir, septembre 2021.
• Etienne Anheim : Les hiérarchies du travail artisanal au Moyen Âge entre histoire et historiographie, in Annales. Histoire, Sciences Sociales, vol. 68, n°4, 2013.
• Mathieu Arnoux : Relation salariale et temps du travail dans l'industrie médiévale, in Le Moyen Age, vol. cxv, n°3-4, 2009.
• Les métiers et corporations de la ville de Paris : XIIIe siècle. Le livre des métiers d'Étienne Boileau, éd. Imprimerie nationale, 1879.