Syracuse

L’accueil des artistes et du public parisien est très cruel lorsqu’Édouard Manet expose pour la première fois son tableau qui s’est d’abord appelé « Le Bain ».

Dans son roman L’Œuvre, Émile Zola décrit la réaction outrée et moqueuse du public face au tableau : "Le bruit de ce tableau si drôle devait se répandre. On se ruait des quatre coins du salon, des bandes arrivaient, se poussaient, voulaient en être. « Où donc là-bas, cette farce ? ». Et les mots d'esprit pleuvaient plus dru qu'ailleurs, c'était le sujet surtout qui fouettait la gaieté. On ne comprenait pas, on trouvait ça insensé, d'une cocasserie à se rendre malade."

Isolde Pludemarcher : "On se presse dans ce salon des Refusés, exactement comme le décrit Zola dans « L'œuvre » pour aller s'amuser, pour aller voir, pour aller se gausser devant les œuvres. Le Déjeuner sur l'herbe est vraiment l'œuvre qui crève les murs. Et on sait que les réactions à ce tableau ont en effet été extrêmement violentes que ce soit le rire ou l'indignation."

En effet, Le Déjeuner sur l’Herbe fait partie des tableaux refusés au Salon de peinture et de sculpture de 1863. Il était alors essentiel pour un artiste d’y être exposé, mais avec ce tableau, Édouard Manet est « refusé » du Salon. Souffle alors un vent de révolte parmi les artistes peintres de l’époque.

Paul Perrin : "Il y a un enjeu très fort qui est lié à l'exposition au salon. Et c'est ce qui va en partie provoquer la crise du salon (...) Car en 1863, le jury est particulièrement sévère et on estime que le jury a refusé à peu près 4000 œuvres sur les 6000 qui lui a été présenté par les artistes pour n'en garder à peu près que 2000 pour l'exposition. Évidemment, les artistes sont furieux et il y a un vent de révolte qui souffle."

C’est Napoléon III lui-même qui va avoir l’idée d’exposer les tableaux refusés dans un salon parallèle. C’est là que le Déjeuner sur l’Herbe est montré au public pour la première fois et changera l’histoire de la peinture.