Le tableau "La Mer de glace", appelé souvent par erreur "Le Naufrage de l’espérance", fut réalisé en 1924 et est aujourd’hui conservé à la Kunsthalle de Hambourg. Pour évoquer ce tableau métaphysique à l’inépuisable polyphonie, Jean de Loisy reçoit l'artiste Stéphane Thidet et le philosophe spécialiste du romantisme Olivier Schefer.
Friedrich s’inscrit comme un des grands maîtres du paysage romantique. Un de ses aphorismes résume les principes de ce mouvement : “Un peintre ne doit pas peindre seulement ce qu’il voit devant lui mais surtout ce qu’il voit en lui-même.”
Il correspond à la grande tradition romantique. Le sculpteur David d’Angers, qui connut Friedrich, a relevé la portée symbolique de la manière dont il construit ses paysages. Le regard du spectateur, privé d’assises stables, semble partir à la dérive et lui donne la sensation d’être suspendu dans l’espace. C’est d’ailleurs en voyant le tableau de "La Mer de Glace", que David D’Angers, en visite dans l’atelier du peintre à Dresde en 1834, aurait utilisé la célèbre formule de “tragédie du paysage” pour définir le nouveau genre qu’aurait développé Friedrich.
La poésie du monde
“C’est un peintre qui est d’une certaine façon très réaliste et en même temps qui produit de vastes horizons, de vastes rêveries. Ce qu’il fait qu’il y a une tension permanente chez lui, entre l’horizon, le lointain et l’extrêmement proche, le détail le plus minutieux. Je pense que cette forme poétique du monde tient dans ce jeu d’aller-retour permanent entre ce qui est là-bas et l’ici.” Olivier Schefer
“Je suis impressionné par cet extrême silence imposé, le calme de cette peinture. Ce qui m’a surpris c’est que de ne pas pouvoir situer le paysage ; il y a presque quelque chose de subaquatique dans cette image. Il y a quelque chose d’irréel.” Stéphane Thidet
“Moi ce qui m’impressionne beaucoup dans cette œuvre c’est qu’elle convoque à peu près tous les genres que Friedrich a mis en œuvre, à savoir la peinture d'histoire et la peinture de paysage, et en même temps il les dépasse. Est-ce vraiment un paysage ? Qui dit paysage dit regardeur, cela suppose une certaine distance qui permette un point de vue et la saisie d’un ensemble structuré. Là on est face à un chaos, un désastre.” Olivier Schefer
Textes lus par Claude Aufaure pendant l'émission :
- Extrait des Carnets de David d'Angers - récit de sa visite à l'atelier de Caspar David Friedrich le 7 novembre 1834
- Lettre de David d'Angers à Victor Paire, le 6 décembre 1834
- Lettre de David d'Angers à sa femme Caroline, le 10 juillet 1822
- Extrait de Neuf lettres sur la peinture de paysage de Carl Gustav Carus, 1831
Musiques :
- The Messenger et Dedication de Valentyn Silvestrov
- Brussel de Hugo Roussel
