Anaïs Demoustier débute au cinéma à 15 ans sous la direction de Michael Haneke, sa filmographie compte plus de films que l'actrice ne compte d'années de vie. Après avoir tourné pour Bertrand Tavernier, Robert Guédiguian, Pascale Ferran, François Ozon, Nicolas Pariser, Christophe Honoré ou Katell Quillévéré, elle signe sa quatrième collaboration avec Quentin Dupieux qui la met en scène dans le film Daaaaaalí !, en salles mercredi 7 février.
Elle y incarne une journaliste qui tente à plusieurs reprises de sonder Salvador Dalí dans une interview, puis dans un documentaire. Non seulement le peintre lui échappe à chaque fois, mais il se soustrait aussi constamment au spectateur. Pour commencer, il n'a jamais le même visage ni la même voix, puisqu'il est joué tour à tour par Gilles Lellouche, Édouard Baer, Jonathan Cohen, Pio Maï, Didier Flamand qui joue Dalí âgé et Boris Gillot qui joue un furtif Dalí aux yeux bleus. Il y a six "a" dans le nom du film pour six interprètes. Ensuite, Dalí se dérobe aussi physiquement à toute tentative de détermination puisqu'il quitte les scènes dès qu'il peut. Par exemple, quand il se rend compte qu'il n'y a pas de caméra pour le filmer ou que quelqu'un d'ennuyeux va lui prendre du temps, c'est-à-dire n'importe quel autre personnage s'adressant à lui.
Le plaisir de jouer d'Anaïs Demoustier
Elle a souvent joué des personnages assez intellos, comme dans Alice et le Maire, de Nicolas Pariser. Et quand Quentin Dupieux la contacte – ce à quoi elle ne s'attendait pas –, pour lui proposer de jouer des personnages qui sont complètement libérés de toute contrainte intellectuelle, elle découvre que ce peut être très agréable.
Anaïs Demoustier : "Jouer la folie, jouer la bêtise, ça rapproche d'un travail de clown qui peut être très agréable. Et ça m'a rappelé mes plaisirs d'enfance, mon rapport très primaire au jeu quand j'étais enfant et le côté ludique de se déguiser aussi. Parce que dans les premiers films que j'ai faits avec Quentin, j'avais souvent des perruques. J'ai une combinaison de super-héroïne dans Fumer fait tousser. Il y a une notion de déguisement comme ça très amusante. Et donc ça m'a rappelé quand j'étais enfant, je mettais des perruques et je mettais des foulards sur la tête pour avoir les cheveux longs, je faisais des faux JT, etc."
Quand elle était petite, on disait d'elle qu'elle était très empathique. C'est inhérent pour elle au travail d'actrice, comme elle l'explique : "On dit beaucoup que les acteurs sont des gens autocentrés, qui sont très narcissiques, c'est évidemment vrai, mais il y a toute une autre part de notre métier qui est finalement très tournée vers le monde, vers les autres. Il y a une hypersensibilité chez les acteurs qui leur permet d'être très perméables aux émotions des autres et c'est ce matériau-là qu'on réinjecte dans les films.
Le film Daaaaaalí !
Elle ressent une complicité très profonde avec le réalisateur Quentin Dupieux, qui la considère comme sa petite sœur. Ils ont un rapport franc et direct, sans séduction. Ils rient des mêmes choses. On retrouve dans ce flm l'humour absurde, jubilatoire de Dupieux. Anaïs Demoustier : "C'est vrai que c'est un réalisateur très exigeant et qui n'a pas peur de la légèreté, aussi, que peut occasionner le cinéma." Elle ajoute : "C'est un cinéma de comédie très léger, mais qui en même temps accorde un énorme soin à l'image ou à l'esthétique."
Le personnage qu'incarne Anaïs Demoustier est Judith, une journaliste qui rencontre Salvador Dali à plusieurs reprises pour tenter de l'interviewer, d'abord pour un magazine, mais elle transforme son projet en documentaire, voyant qu'il ne supporte pas de ne pas être filmé. Elle raconte pourquoi elle aime beaucoup ce personnage : "C'est un personnage qui a l'air normal et qui ne l'est pas, qui a l'air banal mais qui ne l'est pas, qui a l'air d'être un petit rôle, mais qui en fait est une sorte de fil rouge génial dans le film. Donc j'ai beaucoup d'affection pour cette Judith."
Anaïs Demoustier : "En fait, on a l'impression que le spectateur se trouve pris dans le cerveau complètement fou d'un artiste embourbé dans ses névroses, son imaginaire, les gens qui partagent sa vie, les gens qui sont dans sa tête. C'est comme si on prenait un cachet et qu'on pouvait tout à coup être dans la tête d'un artiste fou."
-> Pour en savoir plus, écoutez cet échange passionnant...
Archives :
Interview de Salvador Dalí par Lise Elina en 1958 sur la rdf/rtf.
Extrait du film James et la Pêche géante réalisé par Henry Selick pour les studios Disney en 1996.
La découverte de l'invitée :
L'œuvre de Gustav Klimt, artiste symboliste autrichien, la Frise de Beethoven, réalisée en 1902 et conservée au palais de la Sécession de Vienne.
Le choix musical de l'invitée :
DAFT PUNK - Within
Programmation musicale :
LALA&CE, Jalouse
Lana DEL REY feat. Tommy GENESIS, Peppers