Selon la préfecture de la région Ile-de-France, le 13 mars, quinze cas de SDF contaminés par le coronavirus ont été recensés dans deux centres d'accueil.
Les maraudeurs continuent à aider les SDF mais avec des masques et des gants, en respectant les 1 mètres cinquante de sécurité. C'est le cas de Sarah Frikh, lanceuse d'alerte sur la situation des femmes SDF **et créatrice du mouvement Réchauffons nos SDF. **
Ce qui est triste c'est que les SDF disent qu'ils sont déjà à la rue et qu'ils vont de toute façon mourir. Ils estiment que c'est une situation de fin, on n'a pas fait attention à eux et ils voient pas pourquoi aujourd'hui on va leur donner plus d'attention.
Les maraudes continuent, les distributions de repas continuent et moi je m'occupe des mises à l'abri. **On m'a signalé énormément de femmes seules à la rue, de femmes avec enfants ou des femmes enceintes. **
Il y a une chose qui m'attriste, c'est quand je vois les rayons de supermarché vides de riz et de pâtes. Les gens n'ont pas pensé à nous les maraudeurs. C'est bien d'en prendre chez vous quand vous êtes au chaud mais ce serait bien de nous en donner un peu.
On va tous se réunir pour demander au gouvernement que des gymnases soient ouverts, des hôtels soient mis à disposition, qu'il n'y ait plus personne dehors tant qu'il y a ce virus.
A Puteaux dans les Hauts-de-Seine, Maria, 72 ans, dort depuis plusieurs années dans sa voiture au deuxième sous-sol d'un parking. Elle va vivre chez des particuliers le temps du confinement.
Personne n'est venu me voir, il y a juste la police municipale qui vient me demander si j'ai besoin du 115, c'est tout. **De toute façon, le 115 ça répond pas, y a plus de place parce qu'ici on veut pas de gueux, des misérables, des gens qui ont pas d'argent, on ne dit pas mais on fait comprendre. **
Quand je suis devant la mairie, la maire traverse le trottoir pour ne pas passer à côté. On est invisibles, personne nous voit. (...) Je raconte pas à ma fille que je suis dans la voiture, elle croit que je suis une semaine chez un ami, une autre semaine chez un autre ami, parce qu'avant j'avais beaucoup d'amis. Mais ils ne me parlent plus maintenant.
J'étais jamais malade mais s'il y a quelque chose qui m'arrive, je peux partir et franchement je ne demande même que ça.
Dans une place du 10e arrondissement de Paris, Lionel, Christian et d'autres SDF continuent à chercher de la nourriture.
Dans la rue, on voit tout le monde parler de coronavirus. Quand j'ai regardé la télé chez un monsieur, ça m'a bouleversé avec les alertes en boucle et nous dans la rue, on ne sait rien. Le coronavirus, c'est comme la tuberculose mais ça tue plus vite. On est des Africains, on est des Maghrébins, on est des Français, on est des humains et il n'y a pas d'hygiène. J'ai peur qu'il n'y ait pas de solidarité.
Bachir, intervenant social dans un lieu de mise à l'abri dans le 5e arrondissement, reçoit des familles, en particulier des migrants et demandeurs d'asile, et peine à leur trouver des places. Malgré sa peur de contaminer ses enfants, ce père de famille se bat pour que son centre ne ferme pas.
**Rien n'a été mis en place, si ce n'est le communiqué du gouvernement. On n'a pas énormément de gel hydroalcoolique, le peu de masques qu'on a, c'est des masques basiques. La commande n'a pas été faite pour les masques à filtre et le plus dangereux c'est qu'on reçoit des publics à risques. **
Toutes les deux nuits, on reçoit 46 personnes, soit 20 familles à peu près. On a des familles avec des pathologies lourdes médicalement, avec des enfants handicapés ou des femmes enceintes qui doivent accoucher dans une ou deux semaines. Si on ferme notre centre, on fait comment ? On les remet à la rue ?
Avec le coronavirus, tout est fermé pour les personnes à la rue mais moi ce n'est pas mon but. Je ne veux pas fermer les centres, je ne veux pas que le seul point d'attache qu'ont ces familles-là soit fermé. Même chose pour les restaurant solidaires...
Les associations demandent au gouvernement d'étendre ses mesures d'aide aux SDF en effectuant un acte fort : celui de réquisitionner des logements vides, qui sont très nombreux dans les grandes villes et notamment à Paris, pour y installer des lits, des zones de confinement pour pouvoir accueillir et héberger les sans abris, notamment les personnes infectées.
Reportage : Valérie Borst
Réalisation : Cécile Laffon
Référence musicale : "J'habite tant de voyages", Allain Même, chanté par Allain Leprest et Yves Jamait