Syracuse

Après avoir dirigé son association Aides pendant six ans, Daniel Defert décide de la quitter pour rendre hommage à son compagnon Michel Foucault autrement. Alors que Foucault avait précisé dans son testament, écrit lors d’un voyage en Pologne, qu’il ne voulait pas d’œuvres posthumes, Daniel Defert respecte ses vœux et ne publie rien d’inédit — que de simples entretiens, conférences et articles du philosophe édité par Defert lui-même ainsi que François Ewald et Jacques Lagrange et condensés dans un recueil en quatre volumes publié chez Gallimard en 1994.

Cet ouvrage intitulé Dits et écrits a, selon Daniel Defert, "relancé la lecture de Foucault, tout à fait autrement. C'était à la fois plus accessible que les livres. Les livres étaient commentés par [Foucault] lui-même. C'était donc une voie d'accès aux livres. Et puis, il y avait toutes les interventions ponctuelles, c'est-à-dire qu'il y avait non seulement le philosophe, le théoricien, mais il y avait aussi l'intellectuel, le militant, et il y avait donc une dimension absolument nouvelle, plus familière et plus politique".

Dans les livres qui ont pu mettre à l’honneur Michel Foucault après sa mort, notamment, A l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie d’Hervé Guibert, Ce qu'aimer veut dire de Mathieu Lindon ou encore Foucault, sa pensée, sa personne de Paul Veyne, il est souvent question du fameux appartement "magique" à trois portes dont une qui ressemblait à un placard, qu’ont partagé Daniel Defert et Michel Foucault et dans lequel Defert vit toujours, rue Vaugirard dans le 15e arrondissement de la capitale. Daniel Defert évoque cet appartement qui se dégrade d’ailleurs, mais qu’il n’arrive pas à restaurer. Il évoque également les œuvres cités qui racontent la vie de Foucault et quels effets elles ont pu avoir sur lui : "[j’étais] moins gêné [par le livre de Mathieu Lindon] que par le livre d’Hérvé Guibert".

Michel Foucault et Daniel Defert avait une "relation intellectuelle" selon les dires de ce dernier qui évoque d’ailleurs également le rôle qu’a joué le sida dans l’acceptation des couples homosexuels comme étant plus que seulement physique : "L'expérience du sida a été quand même. Cette chose est très, très importante où on a pu s’exprimer, où les gens, les médecins dans les hôpitaux, les politiques ont pu voir l'intensité des affects, l'intensité de l'amour que les gens se portaient les uns aux autres. On avait tendance à ne faire de l'homosexualité que de la sexualité."

Générique

Une série d'entretiens proposée par Virginie Bloch-Lainé. Réalisation : Laetitia Coia. Prise de son : Yves le Hors.